Le tailleur de pierres Jean KARMANN

La famille Karmann est connue dans les villages de Wiesviller et Woelfling sous le nom de « Steinhauersch » 1

 

Le berceau de la famille à Grosbliederstroff

Aussi loin qu’on puisse remonter dans l’arbre généalogique de cette tentaculaire famille, la racine de l’arbre est Foss Wullenweber qui va changer son nom en Servatius Karman.  Pourquoi Foss change radicalement de nom ? On ne le sait pas. Il naît à Grosbliederstroff en 1620. Fosse à 13 ans quand son village est détruit en 1633 lors de la guerre de 30 ans. Il s’ensuit une terrible épidémie de peste en 1637. Il est boucher et tisseur de laine (comme le nom Wullenweber le suggère). Il épouse vers 1640 Mechtilde de Metze à Hessen. Il naît un fils en 1650, Nicolas, qui aura un destin plus singulier.

Nicolas est chantre et maire de Grosbliederstroff de 1680 à 1701. Il est connu comme le plus grand agriculteur du village.

Il épouse en 1671 Catherine Metzger, originaire de Hombourg-Haut. Un fils, Nicolas Karman, naît de cette union en 1672. Il a la douleur de perdre son épouse en 1681.

Il se remarie en 1682 avec Eve Adam. Le père de Eve était Haut Maire du village en 1674[1]  Ils ont un fils, Jean-Henri.

Ainsi, nous avons deux demi-frères, Jean-Henri et Nicolas. Le premier donnera la branche des sculpteurs de Wiesviller, le deuxième la branche des sculpteurs de Grosbliederstroff.

 

L’origine de la branche de Wiesviller remonte à Jean-Henri Karmann (1690-1754), fils issu de la deuxième union de Nicolas Karman.

Jean-Henri Karmann quitte Grosbliederstroff pour faire sa vie à Spicheren, village de résidence de son épouse, Catherine Weishar. Il est laboureur et membre du syndic en 1748. Un enfant, Jean-Georges Karmann (1719-1789) poursuit le métier de son père à Spicheren.

Pour une raison inconnue, le fils de Jean-Georges, Jean Karmann (1752-1811) naît à Alsting et mène toute sa vie dans ce village comme cultivateur. Il en sera de même pour le fils de Jean, Nicolas Karmann (1798-1865) qui sera cultivateur à Alsting.

C’est avec le fils de Nicolas Karmann, Jean-Nicolas, que va débuter la branche de Wiesviller de la dynastie des sculpteurs.

 

La branche de Wiesviller

Jean Nicolas Karmann (Alsting 1840-Wiesviller 1894)

Né le 12 mai 1840 à Alsting, de Karmann Nicolas et de Weyland Marie (mariage le 13/01/1820). Il vient à Wiesviller à l’âge de vingt ans, dans les années 1860, pour tailler les pierres d’angles en grès de l’église Saint Barthélémy de Wiesviller, construite en 1832, avec le transfert du mobilier façonné par Jean Martersteck de l’ancienne église de 1735.

Il habite en pension chez la famille Hamm-Schuster et leurs 7 enfants, dont il épousa la fille aînée, Catherine Hamm, née le 3 août 1842.

Le mariage eut lieu le 28 avril 1864. Ils résidèrent à Wiesviller et de leur union naîtront 10 enfants.

Son frère, Pierre Karmann, tailleur d’habits, épouse la seconde fille de cette famille : Marguerite Hamm.

En 1881, la famille, avec 8 enfants, s’est installée peu de temps, à Courouvre dans la Meuse, un tout petit village de 199 habitants, pour y exploiter une ferme. La famille figure sur le registre de recensement de l’année 1881, mais lors du  recensement suivant en 1886, la famille n’est plus  inscrite. Ils reviennent à Wiesviller en 1884-1885. Un dernier enfant est né en 1883 à Courouvre.

Il décède à Wiesviller le 27 novembre 1894 à l’âge de 54 ans.

12 enfants naissent à Wiesviller de cette union, dont :

– Karmann Pierre, militaire. Né le 4 juin 1865, il s’engage dans la légion étrangère en partant de Courouvre près de Saint Mihiel. Il vit à Sidi-bel-Abbès, puis sert au 2ème Régiment des zouaves à Oran. Retraité militaire, il fut concierge du cimetière de Mostaganem, près d’Oran où il décède en 1914 à l’âge de 49 ans.

– Karmann Nicolas, tailleur de vêtements. Né le 12 mai 1870, décédé le 19 mai 1944 à Wiesviller. Il apprendra le métier du frère de Jean-Nicolas, Pierre Karmann, qui épouse la deuxième fille de la famille Hamm, Marguerite Hamm. Nicolas apprend à son tour le métier à son fils Jean Karmann, né le 27 mai 1901 de son union avec Marie Gangloff le 20 février 1900.

– Karmann Jean, tailleur de pierre. Né le 23 juin 1871, décédé le 19 juillet 1935. Épouse le 24 juin 1901 Marie Weber

– Karmann Victor, tailleur de pierre. Né le 16 juillet 1877, mort le 12 novembre 1955 à Delme. Épouse le 10 novembre 1903 Hélène Chagot de Tincry.

 

Jean Karmann père (Wiesviller 23/06/1871-Wiesviller 19/07/1935)

Il se marie le 24/06/1901 à Wiesviller avec Marie Weber. 13 enfants naissent de cette union, dont Jean (Fils) et Victor, qui deviendront tous deux tailleurs de pierre.

Il signe plusieurs œuvres, identifiables selon sa signature caractéristique.

– des stèles funéraires

– des croix 

– des monuments aux morts 

Il a offert la sculpture de sa maîtrise,  la Vierge de Lourdes, à la chapelle de la Hermeskappel. C’est une statue de Notre Dame en grandeur Nature sculptée dans la pierre et peinte. Posée sur le côté gauche de l’autel.

Le fils de Jean, Jean Karmann (1904-1971), surpassera son père dans l’art de la sculpture. Jean (père) emmenait ses fils Jean et Victor  sur des chantiers de reconstruction de cathédrales après la première guerre mondiale. C’est là qu’ils ont appris le métier avec leur père.

Les œuvres de la famille Karmann auront marqué durablement les communes de Wiesviller, Woelfling et les alentours proches. Le patrimoine qu’ils ont légué témoigne du savoir-faire artistique de cette famille qui a rayonné sur toute la vallée de la Sarre et au-delà.

 

Sources :

1 Woelfling Jadis. 1990

2 Le patronyme Wullenweber se réfère au Moyen Âge à l’industrie de la laine et dérivé de Wollenmenger, nom enregistré pour la première fois en 1180 à Cologne. 

3 Sous l’Ancien régime, les problèmes de la vie courante de la campagne sont réglés par un Haut-maire, le HeuMeyer

4 Le patrimoine religieux de Wiesviller/Woelfling et Hermeskappel. Francis Freyermuth. 2020. p.89-90 

5 Victor Karmann (1877-1955) s’installera à Delme pour exercer son art

6 Woelfling Jadis. 1990

7 Victor Karmann (1902-1987) s’installera à Château-Salins pour exercer son art. On aimait dans cette famille attribuer le même prénom de génération en génération.

8 Témoignage de Mme Geneviève Kirsch, fille de Jean Karmann (fils)